1. Un genre incertain
Il faut reconnaître, même si cela peut être un peu décevant, que selon la théorie littéraire, la poésie n'est pas un genre à proprement parler. Dans "La Poétique" d'Aristote, ouvrage fondamental pour toute réflexion sur les genres, il n'existe pas de description détaillée d'une forme spécifique qui serait, comme le sont la narration et le théâtre, symétrique à ce que nous appelons aujourd'hui "poésie". Cette ambiguïté est encore renforcée lorsqu'on examine trois éléments qui pourraient, en théorie, définir l'esthétique poétique ou lyrique : l'utilisation du vers, le degré de subjectivité, et le rapport à la fiction.
Recapitulons quelques observations préliminaires avant d'entrer dans une analyse théorique plus approfondie. Ces constatations pourraient être reprises et approfondies ultérieurement :
• Le genre poétique n’a pas, dans les textes fondateurs de la théorie littéraire, de statut distinct qui le placerait au même niveau que les genres narratif ou dramatique.
• La notion de « lyrisme » a été utilisée pour donner à la poésie une consistance « générique ». Elle implique un mode d’énonciation où le poète s'exprime en son propre nom, une thématique centrée sur l'expression de ses sentiments personnels, et une pragmatique qui suggère que le message du poète est reçu comme une sorte de confidence.
• Les critères formels, notamment la versification, n’offrent pas, du moins à l’origine, de base solide pour définir le « genre poétique ».
• Les critères de subjectivité et de non-fiction, bien qu'ils contribuent à décrire l'essence de l'écriture poétique, ne suffisent pas, à eux seuls, à constituer une catégorie homogène.