4. La perspective historique

4.1. Le modèle grec : Platon et Aristote

Si l'on examine la question sous un angle historique, il semble que le texte fondateur en matière de genre littéraire, ou du moins celui qui est considéré comme la référence la plus autoritaire, soit la "Poétique" d'Aristote, bien que cet ouvrage nous soit parvenu dans un état incomplet et désordonné. Le livre commence par une définition des objectifs qu'il entend traiter :

"Nous allons aborder l'art poétique lui-même et ses espèces, l'effet propre à chacune d'entre elles, la manière de structurer les histoires pour obtenir une composition réussie; nous parlerons également du nombre et de la nature des parties qui les constituent, ainsi que de toutes les autres questions pertinentes, en commençant par ce qui vient en premier, selon l'ordre naturel." (P. 85.)

En utilisant le terme "espèces", Aristote, qui reprend des distinctions éparpillées dans différents dialogues de Platon ("La République", "Phèdre", "Ion"), introduit de manière nette l'idée de catégorisation et établit des bases théoriques pour décrire les règles qui les régissent. C'est ainsi que le concept de genre semble être identifié pour la première fois.

Aristote établit ensuite deux distinctions principales :

  • Toutes les "espèces" étudiées par la poétique relèvent d'une forme de mimésis (imitation).
  • La différenciation des "espèces" entre elles peut être effectuée selon les formes que prend cette imitation.

Les chapitres suivants vont expliquer et développer les principes définis dans ce préambule, et notamment proposer de commenter les trois modes d’imitation :

  • les moyens (critère formel) qui permettent de distinguer par exemple la prose des vers ou un combiné des deux ;
  • les objets (critère thématique) à partir desquels se définit la

matière plus ou moins « noble » des personnes représentées (c’est par ce moyen que se différencie la comédie de la tragédie) ;

  • le mode de représentation (critère énonciatif) suivant que les objets sont imités par le récit (ce qui suppose une énonciation à la première ou à la troisième personne) ou bien par la représentation directe (sous la forme de dialogue de théâtre).