I-              Le paragraphe définition

Un paragraphe est une section de texte en prose vouée au développement d'un point particulier souvent au moyen de plusieurs phrases, dans la continuité du précédent et du suivant. Sur plan typographique, le début d'un paragraphe est marqué par un léger renfoncement (alinéa) ou par un saut de ligne. Le symbole du paragraphe est « § ».

Avant le Moyen-âge, le paragraphe n’existait pas : l’unité de composition se situait au niveau de la phrase.  Le signe § apparaît dans les parchemins, qu’il faut économiser, comme un super signe de  ponctuation qui signifie « écrit à côté ».

Un paragraphe doit avoir une seule idée-clef, une idée dominante ou une idée maîtresse, qui peut être soit un résumé de la pensée de l’auteur soit un message au lecteur. Cette idée est par la suite développée à travers des exemples, des illustrations ou des arguments. Dans un récit, chaque paragraphe regroupe une à plusieurs phrases qui portent sur un même sujet : personnage, étape du récit ou de la description. On change donc de paragraphe dans le récit lorsqu’il y a :

- changement de personnage

- changement de l’action ou du lieu

- Changement du moment.

Le découpage en paragraphes permet de faciliter la compréhension  du texte. Il indique en effet au lecteur qu’une partie aborde la même idée maîtresse  au niveau du sens ou de l’action. Il est possible d’attribuer des titres aux paragraphes dans un récit.

Les maîtres du paragraphe au XIXe siècle sont RenanTaineBrunetière. Le critique Gustave Lanson recommande vivement l’enseignement des règles du paragraphe. Pour  lui, le paragraphe est une mini dissertation, un maillon solide dans une chaîne de raisonnement notamment pour les différents types de textes : argumentatifs et explicatifs.

II- Les composantes du paragraphe :

1- L’idée principale : c’est l’idée pour laquelle le  paragraphe est construit. Chaque  paragraphe n’en contient qu’une. Elle se présente souvent sous forme d’une phrase simple et courte.

Ex. En ville, la bicyclette est préférable à la voiture.

Le changement d’idée principale oblige au changement de paragraphe, avec passage à la ligne et commencement en retrait du  paragraphe suivant.

2- L’explication de l’idée : elle développe l’idée principale pour montrer ce que cette dernière signifie exactement et pour la justifier. Sans explication, une idée générale reste une affirmation gratuite. Elle se présente souvent sous forme de phrases complexes.

C’est pour cette raison que l’on ne favorise pas l’utilisation de la conjonction CAR qui est trop réductrice – elle n’est suivie que d’une seule proposition : " Je sors car il fait beau " -- ; en revanche, la conjonction de subordination PARCE QUE permet de donner beaucoup plus d’ampleur à la phrase et donc à l’argumentation ; à ce stade du devoir argumentatif, ce type de construction devient indispensable. " Je sors PARCE QU’il fait beau, QUE des amis m’attendent, QU’ils espèrent depuis longtemps une sortie en mer et QUE mon matériel est prêt depuis plusieurs jours.)

Ex. Elle se faufile partout, parce qu’elle n’a pas besoin de beaucoup de place pour passer. Quand on s’arrête de rouler, on peut la garer où l’on veut, on trouve facilement un endroit où la déposer.

3- L’exemple : Le rôle de l’exemple est le plus souvent d’illustrer une explication déjà donnée. Les exemples servent à expliquer une idée, à préciser une notion générale en exposant un cas particulier. Ils prouvent, ils authentifient une affirmation.

Ex. Quand je vais chercher des revues de motos au bureau de tabac du quartier, je mets moins de temps à bicyclette que mon père lorsqu’il va y chercher son journal en voiture.

On peut faire l’économie de l’exemple lorsque l’explication est suffisamment explicite. Une suite de plusieurs exemples peut parfois remplacer l’explication pour en tirer l’idée principale.

    3-1   La place des exemples

À l'inverse de l'argument qui a une portée générale, l'exemple expose toujours un cas particulier. L'exemple vient illustrer la pertinence de l'argument à travers un cas concret, dans une application vérifiable.

Lorsqu'un exemple suit une idée dans un texte argumentatif, il l'éclaire, la précise et est un exemple illustratif. Cependant il est introduit par des formules telles que: par exemple, ainsi, tel que, comme en témoignage....
Si l'exemple précède l'idée, il présente un cas concret et permet de tirer un enseignement général, un argument ou une conclusion. On l'appelle exemple argumentatif.

  3- 2  Les types des exemples

1/ L'exemple personnel : offre un témoignage direct mais ne permet de tirer aucune loi générale.
2/ L'exemple littéraire : la référence à un livre, un film, une pièce de théâtre, un tableau..., donne un support concret à un argument et permet de le développer.
3/ L'exemple historique : permet un rapprochement avec le passé et il a l'avantage d'être un fait avéré et déjà analysé.
4/ L'anecdote : introduit dans l'argumentation une impression de vie et parfois une note d'humour.
5/ Les statistiques : les chiffres, les données économiques (à condition d'être vérifiées) donnent un fondement scientifique au discours argumentatif.

6/ Le mythe, la fable : rendent plus concrète une idée grâce à un récit

7/ L'image, la comparaison éclairent une idée difficile à comprendre en la représentant visuellement.

3-3 L’organisation des composantes des paragraphes :

 L’ordre dans lequel apparaissent les composantes du  paragraphe n’est pas toujours le même, cela entraînerait la monotonie. On distingue deux grands types d’organisation :

a-  L’organisation déductive : l’idée principale est placée devant l’explication et l’exemple. L’explication sert alors à éclairer, à commenter l’idée principale. C’est une organisation démonstrative.

b-  L’organisation inductive : l’idée principale apparaît en conclusion de l’explication ou des exemples. Elle est alors la conséquence de ce qui est développé dans l’explication ou de ce Qui est présenté par les exemples. C’est une organisation généralisante.

III  Les quatre formes de paragraphe

Selon la place de la phrase clef, qui exprime l’idée principale, on distingue quatre types principaux de paragraphe.

1. — Le paragraphe a priori : le message en tête

Il est déductif et va de l’abstrait au concret, de l’idée générale aux exemples. Le message essentiel est placé dans la première phrase. La suite du paragraphe développe, explique, justifie ce message. L’auteur affirme d’abord et justifie ensuite. Il peut arriver qu’il reformule l’idée principale à la fin, pour insister, en une formule bien frappante qui résume le tout.

Ex. : La pratique d’une activité physique régulière est bénéfique pour tout le monde.En effet, les jeunes qui pratiquent régulièrement un sport sont moins souvent malades et plus vigoureux que les autres.De même, les personnes âgées peuvent combattre le vieillissement par la pratique d’exercices adaptés. Enfin, la pratique régulière d’une activité physique permet l’élimination plus rapide des toxines et stimule le fonctionnement des organes vitaux tels le cœur et les poumons.


2. — Le paragraphe a posteriori : le message à la fin

Il est inductif et va du concret à l’abstrait : il va des faits aux idées. La phrase clef, la plus générale, vient à la fin du paragraphe.

Ex. : Les gens actifs physiquement sont moins malades que chez les gens passifs. Les adeptes de la danse aérobique comptent parmi les employés les plus détendus et les plus efficaces. Les personnes handicapées qui sont sportives restent plus alertes que les autres. Tous ces faits nous amènent à penser que la pratique d’une activité physique régulière est bénéfique pour tout le monde.


3. — Le paragraphe a contrario : le message au centre

Le raisonnement a contrario consiste à affirmer son idée en l’opposant à l’idée inverse, ou du moins à une idée différente. La tactique consiste d’abord à énoncer l’idée adverse et ensuite à la critiquer, et enfin à affirmer sa propre idée. La phrase clef sert de charnière entre la première thèse et son adverse : elle est donc située en milieu de paragraphe.

Ex. : De nombreux accidents cardio-vasculaires sont provoqués par une pratique trop intensive d’activités mal encadrées. Et on ne parle pas de la kyrielle de blessures aux membres et aux articulations que les médecins sportifs doivent traiter annuellement. Cependant, la pratique d’une activité sportive régulière est bénéfique. On constate que les jeunes, les adultes et les personnes âgées qui pratiquent régulièrement une activité physique adéquate en tirent d’immenses profits sur le plan de leur santé et de leur équilibre mental.


4. — Le paragraphe a simile ou en parallèle : le message au centre ou à la fin

Le raisonnement en parallèle, ou par analogie (a simile) est l’inverse du raisonnement a contrario. Au lieu de montrer que les choses s’opposent, on montre qu’elles se ressemblent. La phrase clef peut se trouver au milieu ou à la fin du paragraphe.

Ex. : Certaines activités sportives peuvent être dangereuses, telles les arts martiaux, le hockey, la plongée sous-marine, le ski alpin, qui occasionnent de nombreuses blessures et même des morts chaque année. De même, des gens mal entraînés et mal encadrés voient leur condition physique se détériorer après un entraînement trop vigoureux. Donc, en principe, si une activité physique régulière est bénéfique, n’importe quelle activité ne convient pas à n’importe qui.
IV-  L’usage des paragraphes

Le paragraphe a priori représente environ entre 50 et 75 % des cas. On le rencontre souvent dans le corps des textes, alors que les autres formes sont plus utilisées dans les introductions et les conclusions.
La structure a priori, qui permet de prévoir la suite, facilite continuellement la lecture. Il est privilégié dans la presse, parce qu’il permet un circuit de lecture court : le lecteur peut avoir une idée générale de l’article en ne lisant que la première phrase de chaque paragraphe.
Il s’utilise aussi dans les textes scientifiques, lorsque l’on part d’une théorie connue et admise de tous.

Usage des formes
Les formes a priori et a contrario se rencontrent environ dans 20 % des cas. La forme par analogie (a simile) est la moins fréquente : 10 % des cas.
Ces fréquences s’expliquent par le genre du texte, le caractère de l’auteur, le type de public et surtout la place du paragraphe dans le texte.
La forme a posteriori est fréquemment utilisée dans les exposés de recherche scientifique. Il faut d’abord accumuler un certain nombre d’expériences avant de conclure en énonçant la théorie.
Dans la presse, c’est la forme du reportage qui décrit d’abord une ambiance, un cadre, les propos échangés, la complexité de l’ensemble
La forme a contrario est un type de raisonnement polémique : l’auteur s’affirme en attaquant une thèse adverse. La tactique est très efficace, surtout si une troisième voie n’est pas possible. Un avocat démontrera ainsi que son client ne peut être le coupable, donc qu’il est innocent — et non partiellement responsable.
C’est une forme utilisée dans le domaine des idées, en particulier la philosophie.
La forme par analogie s’emploie de façon privilégiée dans la vulgarisation scientifique et technique. Les comparaisons permettent de faire comprendre un principe au public sans avoir besoin de donner des explications techniques ou compliquées.
Ex. : Une centrale nucléaire à eau sous pression fonctionne comme une cocotte-minute…
V-  Les techniques du paragraphe
La valeur d’un paragraphe dépend de son unité, de sa cohérence et de sa force.
A- L’unité
Pour réussir la rédaction d’un paragraphe, il faut vérifier son unité en lui donnant un titre qui résume son idée clef. Si ce n’est pas possible, il faut le fractionner pour ne garder qu’une idée par paragraphe. Si l’idée est trop mince, il faut la rattacher à un autre paragraphe.
B- La cohérence
Un paragraphe contient des connecteurs, c’est-à-dire des mots qui balisent les opérations logiques qui le structurent :

C- La  force
La valeur d’un paragraphe dépend beaucoup de sa force : le paragraphe ne doit pas être trop long, les exemples doivent être rapportés avec précision et sans bavardage, la construction doit être nette.

La chronologie ou la succession
d’abord, ensuite, enfin…
le premier, le deuxième, le troisième…
hier, aujourd’hui, demain…

au premier plan, au second plan, à l’arrière-plan…
La cause
parce que, c’est pourquoi, car, en effet, puisque, en fait, de fait…
La conséquence
ainsi, aussi, donc, par conséquent, en conséquence, c’est pourquoi…
l’alternative
soit, soit; ou bien, ou bien, d’une part, d’autre part…
l’opposition
au contraire, par contre, en revanche, a contrario…
l’analogie
de même, semblablement, comme, de même que, de même…
l’adhésion
certes, bien entendu, bien sûr, sans doute, assurément…
l’opposition ou la restriction
or, mais, toutefois, cependant, pourtant, néanmoins
l’addition
de plus, encore, en supplément, à cela s’ajoute…
La synthèse
au total, en somme, en bref, en résumé…
La conclusion
pour terminer, pour conclure, en fin de compte, finalement, pour finir…



Pour conclure, en écrivant un paragraphe, il faut se demander au départ quelle technique sera la plus efficace pour le lecteur. Voici un ensemble de recommandations à suivre et des impairs à éviter afin de produire des paragraphes bien structurés:
— annoncer d’avance ce que l’on veut dire ou prouver ;
— placer les arguments d’abord, et la proposition ensuite ;
— procéder par opposition avec une opinion adverse ;
— procéder par analogie avec une opinion ou une idée déjà connue.

Ce qu’il faut éviter ou les défauts courants des paragraphes sont les suivants :
— on annonce une proposition et on en démontre une autre, par glissements successifs ;
— on annonce une idée mais on ne la démontre pas suffisamment : on passe d’un cas particulier sans préparation à une loi générale ;
— on annonce, on démontre, mais on ne conclut pas ;
— on écrit une suite d’exemples sans idée générale ;
— l’exemple est mal adapté à l’idée, ce n’est qu’une anecdote ;
— il y a une confusion d’ensemble sans idée générale nette ;
— on a écrit un long bloc de texte sans alinéa.

Modifié le: Thursday 2 June 2016, 10:21