Cours N°1 : Qu'est-ce que la littérature ?

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Cours: Initiation aux textes littéraires
Livre: Cours N°1 : Qu'est-ce que la littérature ?
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Date: Wednesday 22 January 2025, 13:57

1. Définition

Nombreux sont les dictionnaires et les encyclopédies qui partagent les mêmes définitions attribuées au mot « Littérature », nous notons alors que :
Etymologiquement, le mot « Littérature » est issu du latin « littera » qui signifie lettre, et puis « litteratura » : écriture, grammaire et culture, et désigne :
1. L'ensemble des œuvres écrites ou orales fondées sur la langue et dont la dimension esthétique les distingue des œuvres scientifiques ou didactiques (sens attesté en 1764) ;
2. Les activités de production et d'étude de telles œuvres (sens apparu dans la première partie du XIXe siècle) ;
3. Ensemble de textes publiés relatifs à un sujet, qu'ils aient ou non une dimension esthétique (d'après l'allemand Literatur, 1758). C'est en ce sens que l'on peut parler par exemple de littérature scientifique.
Quant au Dictionnaire de la langue française, il présente quatre sens différents :
1. Sens étymologique : « le domaine de la lettre écrite, la totalité des œuvres écrites et par extension orales ». 2. Sens culturel : « la totalité des connaissances transmises par écrit, par lettres ». 3. Sens quantitatif : « la totalité des écrits de tout contenu, d’un certain temps, lieu ou langue ». 4. Sens qualitatif et esthétique : « la totalité des littératures du monde ».
L’encyclopédie numérique Wikipédia, propose une définition plus précise du mot « littérature », dans son sens le plus courant, et elle la présente comme un aspect particulier de a communication verbale- orale ou écrite- qui met en jeu une exploitation des ressources de la langue afin de multiplier les effets sur le destinataire.
La littérature privilégie ainsi la fonction esthétique, en s’éloignant de la communication utilitaire dont le seul objectif est de transmettre des informations (presse et politique), pour s’intéresser à la forme

2. Histoire du mot « littérature »

Le sens du mot « littérature » a connu de nombreux changement au fil du temps, selon le domaine et l’époque où il est utilisé. Il est passé d’une définition restreinte strictement liée à l’acte d’écriture avec plusieurs conditions, à une notion universelle et générique.
Il serait utile donc, de s’intéresser à l’évolution du concept de littérature depuis l’antiquité jusqu’à nos jours.
Le mot « littérature » provient du mot latin « littératura » dérivé de « littera » (lettres).
Le dictionnaire Gaffiot, a tracé une évolution du sens du mot latin : avec Cicéron (Ier siècle Av. J-C), il désigne « un ensemble de lettres constituant le fait d’écrire » ou « un ensemble de lettres constituées en alphabet » pour Tacite. Le sens s’élargit ensuite avec Quintilieu et Sénèque (Ier siècle Ap.J-C), pour toucher celui de « grammaire, philologie, c’est –à – dire, l’étude technique et érudite des textes écrits », pour aboutir avec Tertullien (début du IIIème Siècle), au sens de « savoir, érudition dans le domaine des textes écrits ».
Dans la langue française, le mot « littérature » fut attesté pour la première fois en 1121en restant fidèle au premier sens latin « chose écrite », et ne retrouve les autres sens développés par les penseurs suscités que tardivement vers la fin du XVe siècle, celui de : « érudition, savoir acquis par les livres », une acception générale qu’il va garder jusqu'au XVIIe siècle, où le mot s'appliquera de plus en plus à un savoir restreint, celui des « belles-lettres » liées au beau langage, notamment sous le règne de Louis XIV qui favorise la vie sociale raffinée faite de pratiques culturelles valorisées.

Au XVIIIe siècle. le mot « littérature » est strictement lié aux « belles-lettres », c'est-à-
dire « d'œuvres reconnues par les gens de goût et constituant la culture mondaine de l'époque
formée par une meilleure éducation et par le monde des salons littéraires et des académies »;
ainsi Voltaire estime que : « La littérature désigne dans toute l'Europe une connaissance des ouvrages de goût ».
Le mot évolue davantage à partir de deuxième moitié XVIIIe siècle, vers un sens plus large celui de « la création langagière écrite » basée sur la subjectivité et libérée de critères esthétiques contraignants.
Au début du XIXe siècle le mot « littérature » acquiert son sens moderne qui devient le sens commun et s'applique à « des textes auxquels on accorde une qualité esthétique que l'on peut discuter ».
Au milieu du XIXe siècle le grammairien Bernard Jullien distingue entre « littérature » et « grammaire », deux concepts intimement liés depuis l’antiquité.
Il estime que la littérature va au-delà de la grammaire, dans la mesure où elle prend en charge l'étude et le questionnement sur le fond, sur le contenu des œuvres. Tandis que la grammaire se limite à la description de la langue, et devient alors un outil pour la littérature qui s'occupera de l'observation des aspects formels.
Finalement, au XXe siècle, le champ de la « littérature » s'élargit à toutes les productions écrites, en prenant en considération le contenu et la forme.

3. Critères de littérarité

Dans son sens moderne, qui est le plus courant, la littérature réfère à l’ensemble des œuvres littéraires à but esthétique, elle représente ainsi un art à part entière. Cependant, il est parfois difficile de tracer les limites de cet art, notamment lorsqu’il s’intéresse à des écrits
d’ordre philosophiques, ou des écrits destinés aux spectacles (scénario, théâtre, BD...).
La dimension esthétique constitue donc un critère fondamental de la littérature, un critère qui permet de la distinguer des autres types d’écrits (journalisme, politique). A première vue, cette définition exclut les écrits purement philosophiques, politiques ou historiques, mais il convient tout de même d’être attentif dans la catégorisation des genres et
types appartenant à la littérature, d’où l’utilité de préciser les critères de littérarité, c'est-à-dire ce qui fait qu’un texte est littéraire. Il s’agit là d’une question pertinente et centrale qui a préoccupé les académiciens et qui a fait l’objet de nombreux débats.

Le dictionnaire de la linguistique définit la littérarité comme :
«L’objet d'une hypothétique science de la littérature, elle se définit par la
structure et la fonction propres au discours littéraire, ce qui implique la définition d'une non- littérarité. La littérarité serait à la littérature ce que la langue est à la parole chez Saussure, c'est-à-dire ce que toutes les œuvres de la littérature ont en commun, dans l'abstrait, comme système.»1
La définition de la littérature en tant qu'ensemble d'œuvres à finalité esthétique est une conception assez moderne, parce qu’auparavant, on avait plutôt tendance à attribuer le statut de littérature à des œuvres correspondant à des critères formels assez stricts.
Dans sa Poétique, Aristote, un des fondateurs de la critique littéraire, se concentre principalement sur la tragédie et l'épopée en instaurant des règles formelles régissant ces discours. L'essai a également appartenu au domaine de la littérature.

La philosophie quant à elle reste ambiguë. Par ailleurs, la poésie a souvent été considérée comme la forme littéraire la plus pure, où l'esthétique de la littérature est présentée dans sa forme la plus stricte.
Il apparaît donc que la littérarité d'une œuvre est sujette au changement et que les siècles ont vu la littérature incorporer des formes de plus en plus diversifiées et populaires.
Les critères de littérarité d’une œuvre est un sujet qui a beaucoup divisé la critique littéraire. Dès l'Antiquité, deux conceptions différentes apparaissent, qui influenceront les différents courants littéraires et artistiques à travers les siècles. Aristote, à travers sa Poétique, insiste sur « la qualité formelle d'une œuvre, au détriment des aspects expressifs qu'il considère secondaires. Le travail d'un écrivain obéit pour lui à des règles strictes, à une théorie ». Par contre, le pseudo-Longin, dans son Traité du Sublime, met en avant l'expression des émotions, « le Sublime transporte, ravit son lecteur ou son auditoire et correspond à la perfection du discours ».
Nous distinguons entre deux types de critères de littérarité dans une œuvre :
Critères internes :
Qui relèvent de la forme des textes. C'est-à-dire l'esthétique, le style, les champs lexicaux, les symboles, les figures de style...
Qui relèvent du contenu des textes, C'est-à-dire les thèmes et valeurs qui permettent d'analyser le texte selon le mode de représentation particulier de la vie que lui insuffle l'auteur.
Qui relèvent des relations entre les textes, soit l'intertextualité. En effet, un texte n'existe que dans une littérature constituée d'autres textes.
Critères externes :
Qui relèvent de l'auteur : l'œuvre est l’expression d'un moi unique, avec une vision particulière.

Qui relèvent du milieu social où celle-ci s'exerce. C'est-à-dire faire un lien entre la qualité de l'œuvre et sa diffusion. Plus celle-ci est largement diffusée et facilement comprise de tous, moins elle est appréciée par la critique littéraire. la part du lecteur. Qui relèvent du lecteur. Il faut que le lecteur s'investisse dans l'œuvre afin d'en donner sa propre interprétation.
Plus il y a de ces critères dans une même œuvre, plus celle-ci est littéraire. Cependant, la littérature peut être perçue différemment selon la vision qu'on a de celle-ci et des critères qui la constituent. Le concept de littérature n'est pas un concept de précision, il faut considérer la littérature dans son ensemble.
Et enfin, pour certains, une grande œuvre littéraire est avant tout celle qui résiste à l’épreuve du temps

4. Conclusion

Le domaine de littérature est certes évolutif et très vague. L'écriture littéraire obéit aux normes de l'orthographe et de la grammaire, mais aussi de la rhétorique, de la poétique.
L'écrivain utilise des outils de langages qui lui permettent de se façonner un style, et il s'autorise également des licences poétiques, des digressions, des néologismes, de manière à appuyer son discours, à rendre esthétique son texte. C'est ainsi qu'il se différencie et devient artiste.